Autel

Publié le par anne

Combien de fois ai-je regardé cet autel en souhaitant m'y blottir? Des milliers de fois. Ces mains m'attiraient. J'avais la certitude que là rien ne pourrait m'arriver de mal, que je ne pourrais pas souffrir. Déjà parce que je serais cachée aux yeux du monde. Et puis blottie comme un foetus dans ces mains immenses, je pourrais  regarder de loin ce monde que je trouvais terrifiant. Un toit au-dessus de moi, l'autel. Les mains sous moi, me portant délicatement. Car le marbre de la table repose sur le bout des doigts, comme un effleurement. Je crois que j'avais envie d'être effleurée par la Vie pour une fois.
Finalement je ne l'ai jamais fait. J'ai grandi. Il y a une semaine je suis retournée dans cette église. Cela faisait bien des années qu'elle s'était installée dans un coin de ma mémoire. Là j'ai gravi les marches  inégales en courant, je suis rentrée dans la fraîcheur douce. Les mains étaient toujours  là. Je me suis accroupie. Et j'ai posé une de mes mains dans une des mains. Instantanément j'étais l'enfant perdue qui posait  sa main dans la main de sa mère, avec confiance. Là je pouvais  partir à la rencontre du monde sans crainte. Le bronze était doux, un peu froid.Je suis sortie et j'ai retrouvé le père Jean Lacouture, tendu au bout de ses 82 ans. Il m'a appris qu'il s'agit de mains de femmes.  Les mains de la Vierge Marie, les main de toutes les mères du monde.
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